Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/136

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homme qui vous gouverne avec le sceptre de fer ; la main d’une vierge est désormais trop faible pour vous conduire.

» — Ratihor, l’un des chefs, se lève à son tour, et dit ces paroles :

» — Pourquoi imiterions-nous les Allemands ? Chez nous la loi est antique et sainte ; elle nous a été apportée par nos pères lorsqu’ils s’établirent dans nos fertiles contrées, après avoir franchi les trois fleuves. Chaque père de famille règne dans sa communauté domestique. Les hommes travaillent aux champs, les femmes filent et cousent ; que si la tête de la maison vient à tomber, les enfants jouissent en commun de l’héritage paternel ; ils se choisissent un chef de leur race, lequel pour le bien de tous va aux assemblées du peuple ;.il y va avec les anciens, avec les guerriers et les chefs. — »

Certes, voilà une exposition très claire du système d’hérédité et de représentation nationale dans l’ancienne Slavie. — Jamais découverte littéraire ne fit plus de bruit que celle de ce petit fragment de poésie. De grandes discussions eurent lieu parmi les savants sur l’authenticité, le sens et la date de ce manuscrit. Dobrowski, le patriarche des érudits bohêmes, fut constamment à la tête des adversaires de ce poëme, qu’il appelle une infâme falsification. Des chimistes furent mandés pour reconnaître et analyser l’encre ; mais sur leur déclaration que l’opération chimique détruirait le manuscrit, Dobrowski n’osa plus le leur livrer. L’amour des monuments nationaux triompha en lui de ses soupçons ; il préféra rester