Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/80

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la nouvelle commune. Tout ce qui était en dehors lui restait étranger et s’appelait çudo. Chaque village indépendant et libre portait le nom de swoboda ou sloboda, qui signifie liberté ; ce nom, tous les villages l’ont encore aujourd’hui.

Il y avait dans chaque colonie, comme dans les anciens établissements grecs et latins, certains endroits réservés que devait respecter le défrichement ou la culture. Tel était le bois sacré où se faisaient les cérémonies religieuses, où se jugeaient les causes, où se traitaient les affaires publiques. Ce bois sacré était appelé Rok ; de là les mots Rocki, Roczki, et autres dérivés qui sont restés dans la législation de plusieurs peuples slaves. Quand survenait une invasion, on coupait dans le bois sacré des branches d’un arbre nommé vicci, et on les envoyait aux autres peuplades en signe d’appel aux armes pour la défense commune. Cette coutume s’est longtemps conservée dans les mœurs polonaises. Près du bois sacré se trouvait un autre lieu dont le nom, Horodyszcze, pourrait se traduire par le Capitole de la colonie : entouré d’un rempart, ce lieu était l’asile où l’on se réfugiait en cas d’invasion imprévue, où l’on se réunissait et s’armait pour repousser l’ennemi. Un troisième endroit répondait au mont Palatin des Romains : c’est là que se faisaient les sacrifices, que les criminels étaient exécutés, et que l’on brûlait les cadavres des morts ; ce dernier lieu s’appelait zyliszcze.

Une telle colonie, entièrement séparée des autres, constituait un état, une société tout à fait à part : elle était gouvernée ou plutôt dirigée par les vieillards ; car