Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
211
CONVENTION NATIONALE.

« Je meurs innocent, dit-il, je pardonne à mes ennemis ; et vous, peuple infortuné !... » Au même instant, le signal du roulement fut donné, le bruit des tambours couvrit sa voix, les trois bourreaux le saisirent. A dix heures dix minutes il avait cessé de vivre.

Ainsi périt, à l’âge de trente-neuf ans, après un règne de seize ans et demi, passé à chercher le bien, le meilleur, mais le plus faible des monarques. Ses ancêtres lui léguèrent une révolution. Plus qu’aucun d’eux, il était propre à la prévenir ou à la terminer ; car il était capable d’être un roi réformateur avant qu’elle éclatât, ou d’être ensuite un roi constitutionnel. Il est le seul prince peut-être, qui, n’ayant aucune passion, n’eut pas celle du pouvoir, et qui réunit les deux qualités qui font les bons rois, la crainte de Dieu et l’amour du peuple. Il périt victime de passions qu’il ne partageait pas ; de celles de ses alentours qui lui étaient étrangères ; et de celles de la multitude, qu’il n’avait pas excitées. Il y a peu de mémoires de roi aussi recommandables. L’histoire dira de lui, qu’avec un peu plus de force d’âme il eût été un roi unique.