Saint-James. L’Angleterre, qui jusqu’alors avait conservé les dehors de la neutralité, saisit cette occasion pour paraître sur le théâtre des hostilités. Disposé depuis longtemps à une rupture, Pitt, déployant toutes ses ressources, conclut, dans l’espace de six mois, sept traités d’alliance et six traités de subsides[1]. L’Angleterre devint ainsi l’âme de la coalition contre la France ; ses flottes étaient prêtes à mettre à la voile ; le ministère avait obtenu quatre-vingts millions extraordinaires, et Pitt allait profiter de notre révolution pour assurer la prépondérance de la Grande-Bretagne, comme Richelieu et Mazarin avaient profité de la crise de l’Angleterre, en 1640, pour établir la domination française en Europe. Le cabinet de Saint-James n’était dirigé que par des motifs d’intérêts anglais. La consolidation de son pouvoir dans son propre pays, l’empire exclusif dans les deux Indes et sur les mers, l’achèvement de la révolution coloniale commencée contre lui, et qu’il importait de rendre commune aux autres puissances maritimes, surtout dans l’Amérique du Sud, afin de servir d’intermédiaire entre les Deux-Mondes, devenus indépendants l’un de l’autre : tels étaient les résultats qu’il espérait de ce grand choc continental.
Le cabinet de Saint-James fit alors la seconde levée de la coalition. L’Espagne venait d’éprouver un changement ministériel : le fameux Godoï, duc d’Alcudia, et depuis prince de la Paix, avait été placé à la tête du gouvernement par une intrigue de l’Angleterre et de l’émigration. Cette puissance rompit avec la république, après avoir vainement intercédé pour Louis XVI, et mis sa neutralité au prix de la vie du roi.
- ↑ Voici quels furent ces traités : 4 mars, articles entre la Grande-Bretagne et le Hanovre ; 25 mars, traité d’alliance de Londres, entre la Russie et la Grande-Bretagne ; 10 avril, traité de subsides avec le landgrave de Hesse-Cassel ; 25 avril, traité de subsides avec la Sardaigne ; 25 mai, traité d’alliance de Madrid avec l’Espagne ; 12 juillet, traité d’alliance de Naples avec les Deux-Siciles ; 14 juillet, traité d’alliance du camp devant Mayence avec la Prusse ; 30 août, traité d’alliance de Londres avec l’empereur ; 21 septembre, traité des subsides avec le margrave de Bade ; 26 septembre, traité d’alliance de Londres avec le Portugal. Dans ces traités, l’Angleterre donnait, surtout à l’Autriche et à la Prusse, des subsides considérables.