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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

de ces insurrections qui se renouvellent depuis le 10 mars, et dont les magistrats n’ont pas averti l’assemblée, il arrivait qu’on portât atteinte à la représentation nationale, je vous le déclare, au nom de la France entière, Paris serait anéanti ; oui, la France entière tirerait vengeance de cet attentat, et bientôt on chercherait sur quelle rive de la Seine Paris a existé. » Cette réponse devint le signal d’un grand tumulte. « Je vous le déclare aussi, s’écria Danton, tant d’impudence commence à nous peser ; nous vous résisterons. » Et se tournant vers la droite : « Plus de trêve entre la Montagne et les lâches qui ont voulu sauver le tyran. »

La plus grande confusion régna alors dans la salle ; les tribunes poussaient des cris contre la droite, les Montagnards éclataient en menaces, de moment en moment les députations se succédaient du dehors, et la convention se trouvait entourée d’une multitude immense. Quelques sectionnaires du Mail et de la Butte-des-Moulins, commandés par Raffet, s’étaient placés sous les couloirs et dans les avenues pour la défendre. Les Girondins résistèrent tant qu’ils purent contre les députations et la Montagne. Menacés au dedans, assiégés au dehors, ils s’autorisaient de cette violence pour exciter l’indignation de l’assemblée. Mais le ministre de l’intérieur, Garat, vint leur enlever cette ressource : appelé pour rendre compte de l’état de Paris, il assura que la convention n’avait rien à craindre ; et l’opinion de Garat, qui passait pour impartial, et que son esprit conciliateur entraînait à des démarches équivoques, enhardit les membres de la Montagne. Isnard fut obligé de quitter le fauteuil, Hérault de Séchelles le remplaça, et ce fut pour les Montagnards le signal de la victoire. Le nouveau président répondit aux pétitionnaires, qu’Isnard avait contenus jusque là : « La force de la raison et la force du peuple sont la même chose. Vous nous demandez un magistrat et la justice ; les représentants du peuple vous la rendront. » Il était fort tard ; la droite était découragée, quelques-uns de ses membres étaient partis ; les pétitionnaires s’étaient portés de la barre sur les sièges des représentants, et