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l’utilitarisme

est la cause d’une autre chose admise comme bonne, sans preuve. L’art médical est bon parce qu’il conduit à la santé ; mais comment prouver que la santé est une chose bonne ? L’art musical est bon pour cette raison, entre beaucoup d’autres, qu’il produit du plaisir. Mais quelle preuve donner que le plaisir soit une bonne chose ? Alors s’il est affirmé qu’il y a une formule générale renfermant toutes les choses bonnes en elles-mêmes, et que toutes les autres choses bonnes le sont comme effets et non comme causes, la formule peut être acceptée ou rejetée, mais ne peut pas être ce qu’on appelle communément prouvée.

Nous ne voulons pas dire pour cela qu’une impulsion aveugle, un choix arbitraire, soient suffisants pour faire accepter ou rejeter cette formule. Le mot preuve a un sens plus large, applicable à cette question philosophique comme à d’autres tout aussi disputées. Cette question est de la compétence de notre faculté rationnelle, qui ne se contente jamais du procédé intuitif. On doit présenter à l’intelligence des considérations capables de la déterminer à donner ou à refuser son assentiment à une doctrine ; cela équivaut à présenter des preuves.

Nous examinerons maintenant de quelle nature doivent être ces considérations, de quelle manière