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preuve du principe d’utilité

soit le seul criterium. Pour y arriver, il semble qu’on n’ait qu’à suivre la même méthode, et qu’à montrer que non seulement les hommes désirent le bonheur, mais qu’ils ne désirent jamais autre chose. Cependant il est évident qu’ils désirent des choses qui, dans le langage ordinaire, sont bien distinctes du bonheur. Par exemple, ils désirent la vertu, l’absence du vice, non moins réellement que le plaisir et l’absence de souffrance. Le désir de la vertu n’est pas aussi universel que le désir du bonheur, mais comme fait il est aussi incontestable. Les adversaires de l’utilitarisme en concluent qu’ils ont raison de professer qu’à côté du bonheur il y a d’autres buts d’action, et que le bonheur n’est pas un principe d’approbation ou de désapprobation.

Mais l’utilitarisme méconnaît-il que les hommes désirent la vertu, a-t-il dit que la vertu n’est pas désirable ? C’est tout le contraire. – Il soutient non seulement qu’on désire la vertu mais qu’on doit même la désirer pour elle-même. – Quelle que soit l’opinion des moralistes utilitaires, quant aux conditions originales qui font que la vertu est vertu, ils peuvent croire (comme ils le font) que les actions et dispositions ne sont vertueuses que parce qu’elles sont faites en vue d’un autre but que la vertu ;