Page:Mill - La Liberté, trad Dupont-White, 1860.djvu/119

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grands maux que ceux qu’on veut prévenir. Quand de telles raisons font obstacle à la responsabilité forcée, la conscience de l’agent lui-même doit prendre la place du juge absent, pour protéger ces intérêts d’autrui qui n’ont pas de protections extérieures, et l’homme doit se juger d’autant plus sévèrement, que le cas ne le soumet pas au jugement de ses semblables.

Mais il y a une sphère d’action dans laquelle la société, comme distincte de l’individu, n’a qu’un intérêt indirect, si même elle en a aucun. Nous voulons parler de cette portion de la conduite et de la vie d’une personne qui n’affecte qu’elle-même, ou qui, si elle affecte également les autres, ne le fait qu’avec leur consentement et leur participation libre, volontaire et parfaitement éclairée. Quand je parle de ce qui touche la personne seulement, j’entends par là ce qui la touche d’abord, immédiatement ; car tout ce qui affecte un individu peut affecter les autres à travers lui, et l’objection qui se fonde sur cette éventualité, sera l’objet de nos réflexions ultérieures. Donc, ceci est la région propre de la liberté humaine. Elle comprend d’abord le domaine du for intérieur, exigeant la liberté de conscience dans le sens le plus étendu du mot, la liberté de pensée et d’inclination, la liberté absolue d’opinions et de sentiments, sur tout sujet pratique, spéculatif, scientifique, moral ou théologique. La liberté d’exprimer