Page:Mill - La Liberté, trad Dupont-White, 1860.djvu/147

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de l’opinion du docteur Johnson croyent que c’était le plus précieux don qu’on pût faire à l’humanité. Eh bien ! d’après cette théorie, traiter comme les plus vils criminels les auteurs de si grands bienfaits et les récompenser par le martyre, n’est pas une erreur et un malheur déplorable pour lesquels l’humanité doive faire pénitence avec le sac et la cendre, mais bien l’état normal et justifiable des choses. Celui qui propose une vérité nouvelle devrait, suivant cette doctrine, se présenter comme faisait chez les Locriens celui qui proposait une loi nouvelle, avec une corde au cou qu’on serrait si l’assemblée publique, après avoir entendu ses raisons, n’adoptait pas sur le champ sa proposition. On ne peut supposer que les personnes qui défendent cette façon de traiter les bienfaiteurs, attachent beaucoup de prix au bienfait. Et je crois que cette manière d’envisager le sujet, appartient presque uniquement aux gens persuadés que des vérités nouvelles pouvaient être désirables autrefois, mais que nous en avons assez maintenant.

Mais assurément ce dicton que la vérité triomphe toujours de la persécution, est un de ces mensonges plaisants que les hommes se répètent les uns aux autres jusqu’à ce qu’ils soient passés en lieux communs, mais que réfute toute expérience.

L’histoire nous montre constamment la vérité réduite au silence par la persécution ; si elle n’est