croyances qu’ils estiment importantes, qui font de ce pays un lieu où n’existe pas la liberté mentale. Depuis longtemps déjà l’unique tort des pénalités légales est de soutenir et de renforcer le stigmate social. C’est ce stigmate seul qui est vraiment efficace, et il l’est tellement qu’on professe beaucoup moins souvent en Angleterre des opinions mises au ban de la société, qu’on n’avoue dans d’autres pays des opinions courant le risque des punitions judiciaires. Pour toutes personnes, excepté celles que leur fortune rend indépendantes de la bonne volonté des autres, l’opinion est sur ce sujet aussi efficace que la loi : des hommes pourraient aussi bien être emprisonnés que privés des moyens de gagner leur pain. Ceux dont le pain est déjà assuré et qui n’attendent la faveur ni des hommes au pouvoir, ni d’aucun corps, ni du public, ceux-là n’ont rien à craindre d’un franc aveu de n’importe quelle opinion, si ce n’est d’être maltraité dans la pensée et les discours d’autrui, et il ne leur faut pas grand héroïsme pour supporter cela. Il n’y a lieu à aucun appel ad misericordiam en faveur de telles personnes. Mais, quoique nous n’infligions pas d’aussi grands maux qu’autrefois à ceux qui ne pensent pas comme nous, nous nous nuisons peut-être plus que jamais par notre manière de les traiter. Socrate fut mis à mort, mais sa philosophie s’éleva comme le soleil dans le ciel et répandit sa lumière sur tout le firmament
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