Page:Mill - La Liberté, trad Dupont-White, 1860.djvu/162

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parce qu’elles ne les entendent jamais nier et discuter. » Sans aucun doute, et un pareil enseignement suffit pour un sujet comme les mathématiques, où il n’y a rien à dire du tout sur le côté faux de la question. Ce qu’a de particulier l’évidence des vérités mathématiques, c’est que les arguments sont tous d’un côté. Il n’y a pas d’objection et pas de réponse aux objections. Mais pour tout sujet sur lequel la différence d’opinion est possible, la vérité dépend d’un équilibre à garder entre deux systèmes de raisons contradictoires. Même dans la philosophie naturelle, il y a toujours quelqu’autre explication possible des mêmes faits : quelque théorie géocentrique au lieu d’une théorie héliocentrique, quelque théorie phlogiston au lieu d’une théorie oxigène, et il faut démontrer pourquoi cette autre théorie ne peut pas être la bonne, et jusqu’à ce que nous sachions comment c’est démontré, nous ne comprenons pas les motifs de notre opinion. Mais si nous nous tournons vers des sujets infiniment plus compliqués, vers la morale, la religion, la politique, les relations sociales et les affaires de la vie, les trois quarts des arguments pour chaque opinion discutée consistent à détruire les apparences qui favorisent l’opinion opposée. On rapporte que le second orateur de l’antiquité étudiait toujours la cause de son adversaire avec autant d’attention, si ce n’est plus, que la sienne propre. Ce