Page:Mille - Anthologie des humoristes français contemporains, 1920.djvu/426

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sement les opérations, qu’il n’entendait rien à la stratégie chinoise.

Le général Hang-Hang leva bien haut son sabre bicuspide, et s’écria :

« You-Tchi ! »

Ce qui voulait dire :

« Sur le dix-huitième escadron du vingt-deuxième régiment, formez la masse ! »

Le commandement : « You-Tchi ! » fut répété par le général Ti-Tzing, puis par le général Tao-Pé, puis à l’infini par d’autres chefs de corps. Les troupes se mirent en mouvement, et les neuf cent mille clochettes tintèrent à nouveau dans la plaine.

Hang-Hang s’écria ensuite de sa voix forte :

« Nao-Tchin ! »

Ce qui voulait dire :

« Sur la droite de la cavalerie formez-vous en bataille ! »

Les généraux répétèrent : « Nao-Tchin ! » et toute l’armée vint se ranger en bataille le long de la rivière Hu-Hu-Han, vis-à-vis de l’armée japonaise.

À ce moment, mon ami Saladier se trouvait près du généralissime. Un grain de poussière entra dans la narine droite dudit Saladier et le fit éternuer d’une façon formidable (Atchim !).

Alors les généraux Ti-Tzjng et Tao-Pé s’écrièrent :

« Ha-Tchim ! »

Tous les chefs de corps répétèrent Ha-Tchim ! et, avant que Hang-Hang pût émettre un commandement contradictoire, l’armée opéra un mouvement tournant qui l’amena sous le feu direct de l’artillerie japonaise. En moins d’une minute, trente-cinq mille Chinois jonchèrent le champ de bataille.

Le reste de l’armée battit en retraite. Seuls les trente-cinq mille cadavres restèrent dans la plaine.