Ces chèvres… languissant, je puis les suivre à peine ;
A peine celle-ci, qu’avec effort je traîne,
Peut-elle, à pas tardifs, regagner les hameaux.
Sous l’épais coudrier, de deux tendres jumeaux,
Jeune espoir du bercail, elle accrut ma richesse…
La corneille, du creux de son yeuse antique…
Mais ce dieu, quel est-il ?
Longtemps j’ai comparé
Ces murs appelés Rome, au village ignoré,
Où nous portons l’agneau sevré de la mamelle.
Du chien, le chien naissant est l’image fidèle ;
Des chèvres, les chevreaux ne sont point différents ;
Tel aux petits objets je comparais les grands.
Mais Rome, de son front, passe les autres villes.
Comme le haut cyprès les viornes débiles.
Quel motif si pressant vers Rome t’a guidé !
La liberté, tardive, enfin m’a regardé.
Quand tombait sous l’acier ma barbe blanchissante.
De mon cœur, Galatée alors était absente ;
Amarylle y régnait, car, dans mes premiers nœuds,
Fortune et liberté ne tentaient plus mes vœux.
Je prodiguais en vain mes victimes bêlantes ;
En vain j’épaississais les crèmes succulentes ;
D’une ingrate cité le plus modique airain.
De son poids, au retour, ne chargeait point ma main.
Je ne m’étonne plus si ta voix, Amarylle,
Importunait les dieux d’une plainte stérile…
Nos pins, tout rappelait tes pas sur ce rivage.
Qu’eusse-je fait ? Comment sortir de l’esclavage,
O mon cher Mélibée ? Eh ! m’était-il permis
De porter mon amour à des dieux plus amis ?…