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KADHÉSCH

nération ; cette effroyable opération est très-dangereuse ; on ne la peut faire avec une sorte de succès qu’avant la puberté ; encore y a-t-il beaucoup de danger ; passé quinze ans, à peine en réchappe-t-il un quart. Aussi ces sortes d’impuissants se vendent cinq à six fois plus que les autres ; à Golconde, on opéra en une fois jusqu’à vingt-deux mille de ces infortunés. Quelle horrible plaie faite à l’humanité ! Les plus fameux sont Éthiopiens ; ils sont si hideux, que les jaloux les paient au poids de l’or.

Les impuissants absolus se qualifient d’eunuques aqueducs, parce qu’étant dépourvus de la verge qui porte le jet au dehors, ils sont obligés de se servir d’un conduit de supplément, faute de ne pouvoir lancer le jet comme les femmes, dont la vulve a tout son ressort. Ceux, au contraire, qui ne sont privés que des testicules, jouissent de toute l’irritation que donnent les désirs, et peuvent en un sens se dire très-puissants (surtout lorsqu’ils n’ont été opérés qu’après que leur organe a reçu tout son développement)[1] ; mais avec cette triste exception que, ne pouvant jamais se satisfaire, l’ardeur vénérienne dégénère chez eux en une espèce de rage ; ils mordent les femmes qu’ils liment avec une précieuse continuité.

On voit que cette sorte d’eunuques a le double avantage de servir sans risque aux plaisirs des femmes

  1. Ergo exspectatos, ac jussos crescere primum
    Testiculos, postquam cœperunt esse bilibres,
    Tonsoris damno tantùm, rapit Heliodorus.

    (Juv., liv. II, s. 6.)

    Lisez, sur la préférence que les dames romaines donnaient aux eunuques, et le parti qu’elles en tiraient, depuis le 365e vers de cette satire jusqu’au 379e.