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L’ANÉLYTROÏDE

Platon, l’ont fait de figure ronde, d’une force extraordinaire ; aussi la race qui en provint voulut déclarer la guerre aux Dieux. Jupiter, irrité, les voulut détruire. Mais il se contenta d’affaiblir l’homme en le dédoublant, et Apollon étendit la peau qu’il noua au nombril… De là le penchant qui entraîne un sexe vers l’autre, par l’ardeur qu’ont les deux moitiés pour se rejoindre, et l’inconstance humaine, par la difficulté qu’a chaque moitié de rencontrer sa correspondante. Une femme nous paraît-elle aimable ? nous la prenons pour cette moitié avec laquelle nous n’eussions fait qu’un tout ; le cœur dit : La voilà, c’est elle ! mais à l’épreuve, hélas ! trop souvent ce ne l’est point.

C’est sans doute d’après quelques-unes de ces idées que les Basiliens et les Carpocratiens prétendirent que nous naissons dans l’état de nature innocente, tel qu’Adam au moment de la création, et par conséquent devant imiter sa nudité. Ils détestaient le mariage, soutenaient que l’union conjugale n’aurait jamais eu lieu sur la terre sans le péché ; regardaient la jouissance des femmes en commun comme un privilège de leur rétablissement dans la justice originelle, et pratiquaient leurs dogmes dans un superbe temple souterrain, échauffé par des poêles, dans lequel ils entraient tout nus, hommes et femmes ; là, tout leur était permis jusqu’aux unions que nous nommons adultère et inceste, dès que l’ancien ou le chef de leur société avait prononcé ces paroles de la Genèse : Croissez et multipliez.

Tranchelin renouvela cette secte dans le douzième siècle ; il prêchait ouvertement que la fornication et l’adultère étaient des actions méritoires ; et les plus fameux d’entre ces sectaires furent appelés les Tur-