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SŒURS MARINES

L’île rocheuse émerge — solitaire oasis
parmi les mille vagues qui déferlent,
bruissantes de mousse et d’éphémères perles.
À l’horizon, nulle voile penchant
sa silhouette errante ; mais les ailes qui passent
de mille mouettes voraces,
et la lune cernée des lueurs du couchant.
Trouble attente !…
Car c’est l’heure imprécise dont va naître le chant
que modulent là-bas les Sirènes…

Nef, demeurez captive à ces rives sereines
où des pêcheurs ont tendu leurs filets !

Or voici la merveille pareille aux mille notes
des flûtes : c’est un rire frais ; c’est un appel ;
c’est un chant embaumé de varech et de sel,
un rauque chant étrange qui soulève
les tuniques du soir, du désir et du rêve !
Ô ce chant ! — Ô ces lèvres d’humide corail
de la chanteuse indolente et sauvage !
Je la vois… Ses cheveux tombent en mille grappes
sur le hâle uni de son front ;