Page:Mirbeau - Chez l’Illustre écrivain, 1919.djvu/66

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Un grand écrivain.


L’illustre Anselme Dervaux (adultères en tous genres, fabrication, commission, exportation) pénétra dans les salons en fête, et ce fut autour de lui comme un bourdonnement de gloire. En avançant, à travers la foule parée, il perçut comme un écho infiniment répercuté, le titre de son dernier livre : « Inassouvie !… Inassouvie ! » Et ce qui lui renvoyait, de partout, cet écho charmeur, ce n’étaient pas de froids et inconscients obstacles, mais les épaules frissonnantes et les bouches pâmées des femmes. Un immense orgueil gonfla son cœur ; la peau rougeaude de son visage se tendit ainsi qu’un drapeau dans une marche de victoire. Saluant, salué, empêtré dans les traînes, le coude maladroit, la jambe prétentieuse, arrêté par mille mains gantées de tendres pressions, il suivit longtemps des rangées parallèles et diagonales de sourires, de regards ivres, de nuques enthousiastes, de poitrines soulevées… Inassouvie ! Inassouvie !