Page:Mirbeau - Chez l’Illustre écrivain, 1919.djvu/74

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joli, la gloire… mais si tu savais comme c’est lourd à porter !

Dumoulin. — Allons donc !… Tu n’as qu’à te laisser vivre.

Le Grand Écrivain. — Tu crois ça ?… Ah ! l’on voit bien que tu ne sais pas ce que c’est que la gloire !… Quelle maîtresse tyrannique et folle, dont il faut satisfaire à toutes les minutes du jour… et de la nuit… les caprices les plus déraisonnables, et les plus ridicules incohérences… Si je te disais que… très souvent… je songe, avec regret… à notre misérable existence d’autrefois… que j’envie ton obscurité… Tiens… vois-tu… il va falloir que je réponde à toutes ces lettres… Et les visites… et les démarches !… (Il pousse un long soupir.) Enfin !… ne parlons pas de ça !… Et toi ?…

Dumoulin. — Oh ! moi !… c’est bête ce que je vais te dire… mais tu l’apprendrais un jour ou l’autre… Voilà !… Hier soir… au Gymnase… À propos, pourquoi n’y étais-tu pas, hier, au Gymnase ?

Le Grand Écrivain. — Les premières !… C’est si mauvais ton !…

Dumoulin. — Le fait est !… Donc, hier soir, au Gymnase… dans un couloir… Paul Barrot parlait de toi… en termes qui ne m’ont pas convenu.

Le Grand Écrivain. — De quoi se mêle-t-il !… Que disait-il de moi ?