Page:Mirbeau - Chez l’Illustre écrivain, 1919.djvu/82

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

détails de maison… Ah ! tu fais bien de ne pas te marier… Tu aurais un joli ménage. Je ne te donnerais pas deux ans pour être ruinée… Du reste, c’est ce qui te pend au nez, quand nous ne serons plus là… {Germaine rit.) Je ne sais pas pourquoi tu ris… En vérité, il n’y a là rien de risible !…

Germaine. — Veux-tu que je pleure ?

Mme Naturel. — Dame ! ça serait plus convenable ! Et puis, il n’y a pas moyen de parler sérieusement avec toi ! (Un petit silence…) Est-ce ennuyeux que ton père ne m’avertisse jamais quand il ramène quelqu’un ! Ce serait si simple de téléphoner. J’ai beau le lui recommander tous les matins… ah ! oui… C’est comme si je chantais ! Avec tout cela, j’ai bien envie de faire tuer un poulet !

Germaine. — Puisque tu sais que mon père ramène toujours quelqu’un… ce qui serait le plus simple, c’est que tu eusses toujours un dîner prêt…

Mme Naturel. — Tu arranges les choses, toi !… L’on voit bien que tu n’as pas la charge de la maison et que cela ne te coûte rien !… Et si, par hasard, il ne ramenait personne, je serais bien avancée avec mon poulet !… Qu’est-ce que je ferais de mon poulet ? On a beau être riche, ça n’est pas une raison pour gaspiller la nourriture !… Je veux bien faire les choses… mais j’ai l’horreur de la gâcherie !