Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/181

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— Tant fait rire ! reprit Jules qui s’irrita davantage… c’est bien ça… Un gros porc qui ne racontait jamais que des histoires de caca !… C’est ton idéal, hein ! de voir les prêtres se barbouiller de leur ordure ?… Eh bien, sois tranquille, dans quelques années, je serai comme l’abbé Gibory… moi aussi, je dirai, en imitant le bruit des coliques débondées : « Fiâ… Fiâ… Fiâ sur les abricots ! »

— Allons ! allons, supplia sa mère… calme-toi, méchant enfant… Aie seulement un peu de patience, un peu de courage, et tu seras tout ce que tu voudras… L’évêque le dit bien… mais c’est ta tête qui te perd…

— L’évêque ?… Beuh !… qu’en sait-il, l’évêque ?… et pourquoi m’a-t-il envoyé ici, l’évêque ?… D’abord, c’est de ta faute, si je suis prêtre !

La pauvre femme tressauta sur sa chaise et fit un geste de protestation étonnée.

— De ma faute ?… gémit-elle… Ah ! Seigneur Jésus !… que dis-tu là ?… Mais rappelle-toi… rappelle-toi.

— Oui, c’est de ta faute… de ta faute…

Il s’emporta :

— Et ça me dégoûte à la fin d’être prêtre ; j’en ai assez de porter cette ridicule robe… de faire des simagrées plus ridicules encore que ma robe, de vivre comme un esclave et comme un castrat…

Sa voix était devenue sourde, voilée… les mots s’arrachaient de sa gorge, avec des efforts violents…

— Je voudrais… je voudrais être Pierre l’Ermite…