Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/294

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eu contre moi un mouvement d’impatience… Une angoisse me ramenait sans cesse à la maison, j’interrogeais Madeleine, cherchant à me rassurer auprès d’elle ; ou bien doucement, sur la pointe du pied, je m’approchais de la porte de la chambre, et je restais là, de longues minutes, à écouter le bruit que faisaient la respiration de mon oncle, et le glissement des pas de ma mère, sur le parquet.

Vers le soir, le cousin Debray arriva.

— Eh bien ! quoi donc ? cria-t-il… Un nom de Dieu de gaillard comme toi ?…

Il fut étonné de trouver mon père et ma mère, installés avant lui, auprès du chevet de malade, et il regarda les tables, les tiroirs, avec une curiosité inquiète d’héritier.

Nous quittâmes la chambre ; l’heure du dîner approchait.

— Eh bien ? interrogea ma mère.

— Il est perdu ! dit mon père… Et ce n’est pas seulement sa maladie de cœur !… c’est sa fièvre !… Pauvre Jules !

Durant toute la soirée, tandis que mon père, retourné aux Capucins, veillait sur le malade, ma mère passa en revue tous nos vêtements noirs, avec le soin calme et méticuleux d’une bonne ménagère.