Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/235

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— Là !… là !… calma le prolixe tourmenteur… Un peu de patience, milady… Et procédons avec méthode, s’il vous plaît… Donc, vous introduisez, dans le trou du pot, une tige de fer, rougie au feu d’une forge… Le rat veut fuir la brûlure de la tige et son éclaboussante lumière… Il s’affole, cabriole, saute et bondit, tourne sur les parois du pot, rampe et galope sur les fesses de l’homme, qu’il chatouille d’abord et qu’ensuite il déchire de ses pattes, et mord de ses dents aiguës… cherchant une issue, à travers les chairs fouillées et sanglantes… Mais, il n’y a pas d’issue… ou, du moins, dans les premières minutes de l’affolement, le rat ne trouve pas d’issue… Et la tige de fer, manœuvrée avec habileté et lenteur, se rapproche toujours du rat… le menace… lui roussit le poil… Que dites-vous de ce prélude ?

Il respira, quelques secondes, et, posément, avec autorité, il enseigna :

— Le grand mérite, en ceci, est qu’il faut savoir prolonger cette opération initiale le plus qu’on peut, car les lois de la physiologie nous apprennent qu’il n’est rien de plus horrible que la combinaison sur une chair humaine des chatouillements et des mor-