Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/262

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— Que tu es assommant, avec tes mots d’esprit et tes méchancetés… Tu verras… tu verras que nous ne pourrons jamais, à cause de cela, nous faire un salon comme il faut.

Et elle ajouta :

— Si tu veux devenir vraiment un homme du monde, apprends d’abord à être un imbécile ou à te taire…

On fit, défit et refit une liste d’invités qui, après de laborieuses combinaisons, se trouva arrêtée comme suit :

La comtesse Fergus, divorcée, et son ami, l’économiste et député, Joseph Brigard.

La baronne Henri Gogsthein, divorcée, et son ami, le poète Théo Crampp…

La baronne Otto Butzinghen et son ami, le vicomte Lahyrais, clubman, sportsman, joueur et tricheur.

Mme  de Rambure, divorcée, et son amie, Mme  Tiercelet, en instance de divorce.

Sir Harry Kimberly, musicien symboliste, fervent pédéraste, et son jeune ami, Lucien Sartorys, beau comme une femme, souple comme un gant de peau de Suède, mince et blond comme un cigare.

Les deux académiciens Joseph Dupont de la Brie, numismate obscène, et Isidore Durand de la Marne, mémorialiste galant dans l’intimité et sinologue sévère à l’Institut…

Le portraitiste Jacques Rigaud.