Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/326

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— Mais tu es une très chic fille… me dit-il… Depuis combien de temps es-tu donc ici ?

— Depuis trois semaines, Monsieur.

— Ça, c’est épatant !…

— Qu’est-ce qui est épatant, Monsieur ?

— Ce qui est épatant, c’est que je n’aie pas encore remarqué que tu fusses une si belle fille…

Il étira ses deux jambes, les allongea vers le tapis… se donna une claque sur les cuisses, qu’il avait blanches et rondes, aussi rondes et aussi blanches que des cuisses de femme…

— Viens ici !… fit-il…

Je m’approchai un peu tremblante. Sans une parole, il me prit par la taille, me renifla, me força à m’asseoir près de lui, sur le rebord du lit…

— Oh ! monsieur Xavier !… soupirai-je, en me débattant mollement… Finissez… je vous en prie… Si vos parents vous voyaient ?

Mais, il se mit à rire :

— Mes parents… Oh ! tu sais… mes parents… j’en ai soupé…

C’était un mot qu’il avait comme ça. Quand on lui demandait quelque chose, il répondait : « J’en ai soupé. » Et il avait soupé de tout…

Afin de retarder un peu le moment de la suprême attaque, car ses mains sur mon corsage devenaient impatientes, envahissantes, je questionnai :

— Il y a une chose qui m’intrigue, monsieur