Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/410

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— Mais non, Madame… Je ne suis pas du tout répondeuse

— Naturellement… Vous le dites… elles le disent toutes… et elles ne sont pas à prendre avec des pincettes… Enfin… voyons… je vous l’ai déjà dit, je crois… sans être particulièrement dure, la place est assez importante… On se lève à cinq heures…

— En hiver aussi ?…

— En hiver aussi… Oui, certainement… Et pourquoi dites-vous : « En hiver aussi ?… » Est-ce qu’il y a moins d’ouvrage en hiver ?… En voilà une question ridicule !… C’est la femme de chambre qui fait les escaliers, le salon, le bureau de Monsieur… la chambre, naturellement…, tous les feux… La cuisinière fait l’antichambre, les couloirs, la salle à manger… Par exemple, je tiens à la propreté… Je ne veux pas voir chez moi un grain de poussière… Les boutons des portes bien astiqués, les meubles bien luisants… les glaces bien essuyées… Chez moi, la femme de chambre s’occupe de la basse-cour…

— Mais, je ne sais pas, moi, Madame…

— Vous apprendrez !… C’est la femme de chambre qui savonne, lave, repasse, — excepté les chemises de Monsieur, — qui coud… je ne fais rien coudre au dehors, excepté mes costumes — qui sert à table… qui aide la cuisinière à essuyer la vaisselle… qui frotte… Il faut de l’ordre… beaucoup d’ordre… Je suis à cheval sur l’ordre…