Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/321

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» – Non, non… je ne le réparerai pas… Il ne vaut pas cinquante écus… Il arrivera ce qui voudra…

» – Vous allez réparer votre mur, poursuit le fonctionnaire d’un ton impératif… parce qu’il menace ruine, et qu’il endommagerait la route en tombant… Et retenez bien ceci : si votre mur tombait, je vous dresserais un nouveau procès-verbal, et vous en auriez, cette fois, pour cent écus d’amende…

« Le père Rivoli s’affole :

» – Pour cent écus !… Ah ! malheur ! Dans quel temps est-ce que je vivons ?

» – Mais auparavant, écoutez-moi bien… Vous allez, sur du papier timbré de douze sous, demander au préfet une autorisation…

» – J’ sais point écrire…

» – Ce n’est point mon affaire… Enfin, voilà… j’ai l’œil…

« Le père Rivoli rentre chez lui. Il ne sait quelle résolution prendre ; mais il sait aussi que l’administration ne badine pas avec les pauvres gens. S’il répare son mur, c’est cinquante écus d’amende ; s’il ne le répare pas, c’est cent écus… On l’oblige à réparer son mur, et on le lui défend en même temps. Dans tous les cas, il est en faute, et il doit payer… Ses idées s’embrouillent. Il a mal à la tête. Et sentant, dans toute leur étendue, son impuissance et sa détresse, il soupire :

» – Et le député, l’autre jour, m’a dit que je suis