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Maintenant des feuilles d’automne tournent dans les rues.

C’est la fin d’un bel été, comme il n’y en avait pas eu depuis longtemps, un très bel été.

VI

Dans la chaleur qui ne cesse pas encore, Daniel lit sur son balcon, un store bat sur sa tête, évoquant la mer étincelante, la voile qui prend le vent, le large.

Paris est désert. Daniel s’ennuie. À quoi bon prendre le train, pour lui il n’y a qu’un voyage : Venise, et ça ne lui est pas permis. Il est désaxé comme une femme, en proie à trop de songes où Germaine, amoureuse, lui ouvre ses bras. Il est las d’attendre.

Le plateau du thé vient d’être posé sans qu’il s’en aperçoive, sur la table d’osier, entre ses livres. Il étend la main pour prendre la théière, lorsque tout à coup, il voit contre la tasse, une carte bleue de nuit, appuyée, « le Pont des Soupirs », la même hélas, et sans doute exprès, que celle jointe à la lettre de Jérôme autrefois. Daniel est immédiatement si troublé. Mais sur celle-ci, c’est un autre message : « Je reviens, dit Germaine, pourquoi ne m’écrivez-vous plus ? » Le store bat près du ciel, davantage. Est-ce la mer.

Daniel respire à plein poumon, l’air du large.

Se venger.

Le soir même, dans les étoiles naissantes, il remonte au petit bar de Montmartre. Ce sont, croit-il, des représailles. Il faut que