Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Plus clairement ! Double âne, n’as-tu donc jamais quitté la terre ferme ? Je te dis que je venais donner à ton maître quelques renseignements sur son petit-fils : entends tu maintenant ?

À ces mots le domestique trembla de tous ses membres ; car c’était lui qui avait eu spécialement soin des premières années de Louis de Winchestre, et il lui était attaché comme à son propre fils. — Que Dieu vous récompense, reprit-il enfin, si vous nous apprenez ce qu’il est devenu ! Venez avec moi, brave homme, mon maître sera heureux de vous entendre.

— Celui-ci parle assez bien, pensa Dirk Dirkensen, tout en le suivant à travers une longue et haute galerie ; mais que le Ciel confonde son camarade !

Ils arrivèrent à l’appartement du vieillard. C’était un salon immense, dont la voûte gothique était ornée de sculptures et d’arabesques. Les murailles étaient couvertes d’une tapisserie de Bruges, chef-d’œuvre de ces manufacturiers flamands qui ne connaissaient point de rivaux. On y voyait représenté des plus vives couleurs le fameux tournoi qui servit de modèle aux fêtes chevaleresques des comtes de Provence et des ducs de Bourgogne, imitées à leur tour par les rois et par les empereurs. Le seigneur de Gruthuysen et celui de Ghistelles, chefs des deux partis, couraient l’un contre l’autre, la visière baissée et la lance en arrêt, sous les yeux de ces belles dames de Bruges, parmi lesquelles une reine de France croyait voir