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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/69

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LE GUEUX DE MER

qu’il y a peu de personnes en Flandre aussi dévouées à la bonne cause que je le suis ; mais qui n’éprouverait pas un transport d’amour pour notre bon roi à la vue de cette flotte qu’il envoie pour nous défendre ! Quel témoignage éclatant de son zèle et de sa grandeur ! Que ces vaisseaux immenses et richement décorés l’emportent sur ceux de notre pays ! Voyez, par exemple, ce flibot tout noir vers lequel se dirigent constamment vos regards ; peut-on le comparer aux navires espagnols, et sa vue n’inspire-t-elle pas un sentiment de dégoût et de mépris ?

Jusque là le vieux loup de mer était resté maître de lui-même ; mais quand il entendit parler avec tant de dédain de ce flibot, sur lequel il avait navigué lui-même plusieurs années, il pâlit de colère et des éclairs jaillirent de ses yeux : Femme, s’écria-t-il, ne parle point de ce que tu ne peux comprendre ; ce flibot est le chef-d’œuvre d’Ewout Pietersen Worst.

— Ewout Pietersen Worst ! répéta la baronne en levant les mains au ciel ; le fameux chef des gueux de mer !

— Lui-même, répliqua le pilote. Vous savez qu’avant d’être amiral de Flessingue il s’était rendu célèbre comme constructeur de navires. C’est lui qui a bâti ce flibot que vous méprisez, ce flibot léger et rapide, plus précieux pour un véritable homme de mer que toutes vos grandes carcasses de galions, fussent-elles dorées d’un bout à l’autre ; et, quoique je sois moi-même de l’équipage de ce navire, je puis