Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/385

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Sans chercher plus avant quel intérêt vous presse,
J’ai deux fois, à Léon, écrit à la comtesse ;
Et deux fois au marquis Dom Louis, à Burgos,
Avec cette réponse êtes-vous en repos ?

Dom Garcie
Vous n’avez point écrit à quelque autre personne,
Madame ?

Done Elvire
Madame ? Non, sans doute, et ce discours m’étonne.

Dom Garcie
De grâce songez bien avant que d’assurer,
En manquant de mémoire on peut se parjurer.

Done Elvire
Ma bouche sur ce point ne peut être parjure.

Dom Garcie
Elle a dit toutefois une haute imposture.

Done Elvire
Prince.

Dom Garcie
Prince. Madame.

Done Elvire
Prince. Madame. Ô Ciel ! quel est ce mouvement,
Avez-vous, dites-moi, perdu le jugement ?

Dom Garcie
Oui, oui, je l’ai perdu, lorsque dans votre vue,
J’ai pris pour mon malheur le poison qui me tue ;
Et que j’ai cru trouver quelque sincérité
Dans les traîtres appas dont je fus enchanté.

Done Elvire
De quelle trahison pouvez-vous donc vous plaindre ?

Dom Garcie
Ah ! que ce cœur est double et sait bien l’art de feindre !
Mais tous moyens de fuir lui vont être soustraits.
Jetez ici les yeux, et connaissez vos traits ;
Sans avoir vu le reste, il m’est assez facile
De découvrir pour qui vous employez ce style.

Done Elvire
Voilà donc le sujet qui vous trouble l’esprit ?

Dom Garcie
Vous ne rougissez pas en voyant cet écrit ?

Done Elvire