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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/439

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Et ce sont des plaisirs qu’on peut, dans nos familles,
Lorsque l’on a du bien, permettre aux jeunes filles.
Un ordre paternel l’oblige à m’épouser ;
Mais mon dessein n’est pas de la tyranniser.
Je sais bien que nos ans ne se rapportent guère,
Et je laisse à son choix liberté tout entière.
Si quatre mille écus de rente bien venants,
Une grande tendresse et des soins complaisants
Peuvent, à son avis, pour un tel mariage,
Réparer entre nous l’inégalité d’âge,
Elle peut m’épouser ; sinon, choisir ailleurs.
Je consens que sans moi ses destins soient meilleurs ;
Et j’aime mieux la voir sous un autre hyménée,
Que si contre son gré sa main m’était donnée.

Sganarelle
Hé ! Qu’il est doucereux ! C’est tout sucre et tout miel.

Ariste
Enfin, c’est mon humeur, et j’en rends grâce au ciel.
Je ne suivrais jamais ces maximes sévères,
Qui font que les enfants comptent les jours des pères.

Sganarelle
Mais ce qu’en la jeunesse on prend de liberté
Ne se retranche pas avec facilité ;
Et tous ses sentiments suivront mal votre envie,
Quand il faudra changer sa manière de vie.

Ariste
Et pourquoi la changer ?

Sganarelle
Pourquoi ?

Ariste
Oui.

Sganarelle
Je ne sais.

Ariste
Y voit-on quelque chose où l’honneur soit blessé ?

Sganarelle
Quoi ? Si vous l’épousez, elle pourra prétendre
Les mêmes libertés que fille on lui voit prendre ?

Ariste
Pourquoi non ?

Sganarelle