Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/480

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378 NOTICE,

peut dire qu’il trdvailloit ssous les gens de qualité pour leur apprendre après à vivre à leurs dépens, et qu’il étoit en ce temps et encore présentement leur écolier et leur maître tout ensemble. Ces messieurs lui donnent souvent à diner, pour avoir le temps de l’instruire, en dînant, de tout ce qu’ils veulent lui faire mettre dans ses pièces ; mais comnie il ne manque pas de vanité, il rend tous les repas qu’il reçoit, son esprit le faisant aller de pair avec beaucoup de gens qui sont au-dessus de lui... Cependant le nombre des notes qu’on lui fournissoit devint si considérable, qu’il s’avisa, pour satisfaire les gens de qualité, et pour les railler, ainsi qu’ils le sonbaitoient, de faire une pièce oii il pût mettre quantité de leurs portraits. 11 fit donc la comédie des Fâcheux, dont le sujet est autant méchant que l’on puisse imaginer, et qui ne doit pas être appelée une pièce de théâtre : ce n’est qu’un amas de portraits détachés, et tirés de ces mémoires, mais qui sont si naturellement représentés, si bien touchés et si bien finis, qu’il en a mérité beaucoup de gloire ; et ce qui fait voir que les gens de qualité sont non-seulement bien aises d’être raillés, mais qu’ils souhaitent que l’on connoisxe que c’est d’eux que l’on farle, c’est qu’il s’en trouvait qui faisoient en plein théâtre, lorS’ qu’on les jouoit, les mêmes actions gue les comédiens faisoient pour les contrefaire. »

Dans la comédie des Fâcheux, dit avec raison M. Bazin, « la scène était de niveau avec l’amphithéâtre. Ici et là les mêmes hommes, les mêmes canons, les mêmes plumes, les mômes postures, excepté que, du côté où le ridicule a été copié, on se tait, on écoute, et que là où il figure unité, on parle, on agit, on fait rire. La comédie se soutient ainsi pendant trois actes, attachée à ime intrigue fort légère, mais toujours sans déroger et dans la splière la plus haute des travers de bonne compagnie : marquis éventé, marquis compositeur, vicomte bretteur, courtisan joueur, belles dames précieuses, solliciteurs à la suite des grands, colporteurs ae projets, amis imj oriuns ; et, parmi tout cela, toujours le nom du roi ramené avec art, d’une manière respectueuse et sans bassesse. »

Parmi les s’pectateurs qui applaudirent les Fâcheux em château de Vaux, se trouvait la Fontaine, ami, comme on sait, du surin» tendant. Dans une lettre écrite peu de jours après, où il raconte à Maucroix les divertissements dont il a été" témoin, la Fontaine exprime ainsi, à propos des Fâcheux, sou admiration pouf Molière :

c’est un ouvrage de Molière :

Cet écrivain par sa manière

Charrne à pjésent toute la cour.

De l :i façon que son nom tourt,

Il doit éiTî par delà Rome :

J’«B suis Mvi, car c’est mon homiQS