Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/569

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Qu’avez-vous ?

Arnolphe.

Moi ? rien. C’est que je tousse.

Horace.

Avez-vous jamais vu d’expression plus douce ?
Malgré les soins maudits d’un injuste pouvoir,
Un plus beau naturel peut-il se faire voir ?
Et n’est-ce pas sans doute un crime punissable
De gâter méchamment ce fonds d’âme admirable,
D’avoir dans l’ignorance et la stupidité

Voulu de cet esprit étouffer la clarté ?
L’amour a commencé d’en déchirer le voile ;
Et si par la faveur de quelque bonne étoile,
Je puis, comme j’espère, à ce franc animal,
Ce traître, ce bourreau, ce faquin, ce brutal,...

Arnolphe.

Adieu.

Horace.

Comment, si vite ?

Arnolphe.

Il m’est dans la pensée
Venu tout maintenant une affaire pressée.

Horace.

Mais ne sauriez-vous point, comme on la tient de près,
Qui dans cette maison pourrait avoir accès ?
J’en use sans scrupule ; et ce n’est pas merveille
Qu’on se puisse, entre amis, servir à la pareille.
Je n’ai plus là dedans que gens pour m’observer ;
Et servante et valet, que je viens de trouver,
N’ont jamais, de quelque air que je m’y sois pu prendre,
Adouci leur rudesse à me vouloir entendre.
J’avais pour de tels coups certaine vieille en main,
D’un génie, à vrai dire, au-dessus de l’humain :
Elle m’a dans l’abord servi de bonne sorte ;
Mais depuis quatre jours la pauvre femme est morte.
Ne me pourriez-vous point ouvrir quelque moyen ?

Arnolphe.

Non, vraiment ; et sans moi vous en trouverez bien.

Horace.