Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/594

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Qu’Agnès et le corps mort s’en sont allés ensemble.

Arnolphe.

La voici. Dans ma chambre allez me la nicher :
Ce ne sera pas là qu’il la viendra chercher ;
Et puis c’est seulement pour une demie-heure :
Je vais, pour lui donner une sûre demeure,
Trouver une voiture. Enfermez-vous des mieux,
Et surtout gardez-vous de la quitter des yeux.
Peut-être que son âme, étant dépaysée,
Pourra de cet amour être désabusée.


Scène 6



Arnolphe, Horace


Horace.

Ah ! je viens vous trouver, accablé de douleur.

Le Ciel, Seigneur Arnolphe, a conclu mon malheur ;
Et par un trait fatal d’une injustice extrême,
On me veut arracher de la beauté que j’aime.
Pour arriver ici mon père a pris le frais ;
J’ai trouvé qu’il mettait pied à terre ici près ;
Et la cause, en un mot, d’une telle venue,
Qui, comme je disais, ne m’était pas connue,
C’est qu’il m’a marié sans m’en récrire rien,
Et qu’il vient en ces lieux célébrer ce lien.
Jugez, en prenant part à mon inquiétude,
S’il pouvoit m’arriver un contre-temps plus rude.
Cet Enrique, dont hier je m’informois à vous,
Cause tout le malheur dont je ressens les coups ;
Il vient avec mon père achever ma ruine,
Et c’est sa fille unique à qui l’on me destine.
J’ai, dès leurs premiers mots, pensé m’évanouir ;
Et d’abord, sans vouloir plus longtemps les ouïr,
Mon père ayant parlé de vous rendre visite,
L’esprit plein de frayeur je l’ai devancé vite.
De grâce, gardez-vous de lui rien découvrir
De mon engagement qui le pourrait aigrir ;
Et tâchez, comme en vous il prend grande créance,