Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/676

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.




Scène II

Sganarelle, Géronimo.


Géronimo, ayant entendu les dernières paroles de Sganarelle.

Voilà un ordre fort prudent.

Sganarelle

Ah ! seigneur Géronimo, je vous trouve à propos ; et j’allais chez vous vous chercher.

Géronimo

Et pour quel sujet, s’il vous plaît ?

Sganarelle

Pour vous communiquer une affaire que j’ai en tête, et vous prier de m’en dire votre avis.

Géronimo

Très volontiers. Je suis bien aise de cette rencontre, et nous pouvons parler ici en toute liberté.

Sganarelle

Mettez-donc dessus[1], s’il vous plaît. Il s’agit d’une chose de conséquence, que l’on m’a proposée ; et il est bon de ne rien faire sans le conseil de ses amis.

Géronimo

Je vous suis obligé de m’avoir choisi pour cela. Vous n’avez qu’à me dire ce que c’est.

Sganarelle

Mais, auparavant, je vous conjure de ne me point flatter du tout, et de me dire nettement votre pensée.

Géronimo

Je le ferai, puisque vous le voulez.

Sganarelle

Je ne vois rien de plus condamnable qu’un ami qui ne nous parle pas franchement.

Géronimo

Vous avez raison.

Sganarelle

Et dans ce siècle on trouve peu d’amis sincères.

Géronimo

Cela est vrai.

Sganarelle

Promettez-moi donc, seigneur Géronimo, de me parler avec toute sorte de franchise.

  1. C’est-à-dire : mettez votre chapeau sur votre tête ; comme on dit aujourd’hui couvrez-vous, en sous-entendant encore la tête.