Seigneur Sganarelle, changez, s’il vous plaît, cette façon de parler. Notre philosophie ordonne de ne point énoncer de proposition décisive, de parler de tout avec incertitude, de suspendre toujours son jugement ; et, par cette raison, vous ne devez pas dire, je suis venu, mais, il me semble que je suis venu.
Il me semble ?
Oui.
Parbleu ! il faut bien qu’il me le semble, puisque cela est.
Ce n’est pas une conséquence, et il peut vous le sembler, sans que la chose soit véritable.
Comment ! il n’est pas vrai que je suis venu ?
Cela est incertain, et nous devons douter de tout.
Quoi ! je ne suis pas ici, et vous ne me parlez pas ?
Il m’apparaît que vous êtes là, et il me semble que je vous parle ; mais il n’est pas assuré que cela soit.
Hé ! que diable ! vous vous moquez. Me voilà, et vous voilà bien nettement, et il n’y a point de « me semble » à tout cela. Laissons ces subtilités, je vous prie, et parlons de mon affaire. Je viens vous dire que j’ai envie de me marier.
Je n’en sais rien.
Je vous le dis.
Il se peut faire.
La fille que je veux prendre est fort jeune et fort jolie.
Il n’est pas impossible.