Aller au contenu

Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/303

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
EROXÈNE, à Tyrène.

Tu me plais loin de moi.Je m’aime où tu n’es pas.

ACANTHE.

Ne cesseras-tu point cette rigueur mortelle ?

TYRÈNE.

Ne cesseras-tu point de m’être si cruelle ?

DAPHNÉ.

Ne cesseras-tu point tes inutiles vœux ?

EROXÈNE.

Ne cesseras-tu point de m’être si fâcheux ?

ACANTHE.

Si tu n’en prends pitié, je succombe à ma peine.

TYRÈNE.

Si tu ne me secours, ma mort est trop certaine.

DAPHNÉ.

Si tu ne veux partir, je vais quitter ce lieu[1].

ÉROXÈNE.

Si tu veux demeurer, je te vais dire adieu.

ACANTHE.

Hé bien ! en m’éloignant je te vais satisfaire.

TYRÈNE.

Mon départ va t’ôter ce qui peut te déplaire.

ACANTHE.

Généreuse Eroxène, en faveur de mes feux
Daigne au moins, par pitié, lui dire un mot ou deux.

TYRÈNE.

Obligeante Daphné, parle à cette inhumaine,
Et sache d’où pour moi procède tant de haine.


Scène II.


DAPHNÉ, ÉROXÈNE.

ÉROXÈNE.

Acante a du mérite, et t’aime tendrement
D’où vient que tu lui fais un si dur traitement ?

DAPHNÉ.

Tyrène vaut beaucoup, et languit pour tes charmes :
D’où vient que sans pitié tu vois couler ses larmes ?

ÉROXÈNE.

Puisque j’ai fait ici la demande avant toi,
La raison te condamne à répondre avant moi.

  1. Var. Si tu ne veux partir, je vais quitter ce lieu.