Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/446

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Elmire
Quoi ! vous sortez si tôt ? Vous vous moquez des gens.

Rentrez sous le tapis, il n’est pas encor temps ;
Attendez jusqu’au bout, pour voir les choses sûres,
Et ne vous fiez point aux simples conjectures.

Orgon
1535Non, rien de plus méchant n’est sorti de l’enfer.


Elmire
Mon Dieu ! l’on ne doit point croire trop de léger.

Laissez-vous bien convaincre avant que de vous rendre ;
Et ne vous hâtez point, de peur de vous méprendre.
(Elmire fait mettre Orgon derrière elle.)



Scène 7

Tartuffe, Elmire, Orgon.


Tartuffe, sans voir Orgon.
Tout conspire, madame, à mon contentement.

1540J’ai visité de l’œil tout cet appartement.
Personne ne s’y trouve ; et mon âme ravie…

(Dans le temps que Tartuffe s’avance les bras ouverts pour embrasser Elmire, elle se retire, et Tartuffe aperçoit Orgon.)

Orgon, arrêtant Tartuffe.
Tout doux ! vous suivez trop votre amoureuse envie,

Et vous ne devez pas vous tant passionner,
Ah ! ah ! l’homme de bien, vous m’en voulez donner !
1545Comme aux tentations s’abandonne votre âme !
Vous épousiez ma fille, et convoitiez ma femme !
J’ai douté fort longtemps que ce fût tout de bon,
Et je croyais toujours qu’on changerait de ton ;
Mais c’est assez avant pousser le témoignage :
1550Je m’y tiens, et n’en veux, pour moi, pas davantage.

Elmire, à Tartuffe
C’est contre mon humeur que j’ai fait tout ceci ;

Mais on m’a mise au point de vous traiter ainsi.

Tartuffe, à Orgon.
Quoi ! vous croyez… ?


Orgon
Quoi ? vous croyez… ? Allons, point de bruit, je vous prie,

Dénichons de céans, et sans cérémonie.