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ACTE V
Scène 1
Orgon, Cléante.
Cléante
Où voulez-vous courir ?
Orgon
Las ! que sais-je ?
Cléante
Il me sembleQue l’on doit commencer par consulter ensemble
Les choses qu’on peut faire en cet événement.
Orgon
Cette cassette-là me trouble entièrement.Plus que le reste encore elle me désespère.
Cléante
Cette cassette est donc un important mystère ?
Orgon
C’est un dépôt qu’Argas, cet ami que je plains,
Pour cela dans sa fuite il me voulut élire ;
Et ce sont des papiers, à ce qu’il m’a pu dire,
Où sa vie et ses biens se trouvent attachés[1].
Cléante
Pourquoi donc les avoir en d’autres mains lâchés ?
Orgon
Ce fut par un motif de cas de conscience.J’allai droit à mon traître en faire confidence ;
Et son raisonnement me vint persuader
De lui donner plutôt la cassette à garder,
Afin que pour nier, en cas de quelque enquête,
- ↑ Les mémoires du temps sont pleins d’aventures semblables à celle d’Orgon. Nous en rapporterons une que Voltaire a mise au théâtre. En 1661, c’est-à-dire à peu près à l’époque où Molière commençait le Tartuffe, Gourville, obligé de fuir pour ne pas être pendu en personne comme il le fut en effigie, laissa deux cassettes précieuses, l’une à Ninon, l’autre à un dévot hypocrite. À son retour, Ninon lui rendit sa cassette en fort bon état, mais il n’en fut pas de même de l’hypocrite ; celui-ci avait employé le dépôt en œuvres pies, préférant, disait-il, le salut de l’âme de Gourville à un argent qui sûrement l’aurait damné.
(Aimé Martin.)