Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/157

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bennes plus de la pauro Françon, et del paure Jeanet, que soun lous fruits de nostre mariatge[1].

NÉRINE.

Bayez un peu l’insolence ! Quoi ! tu ne te souviens mie de chette pauvre ainfain, no petite Madeleine, que m’as laichée pour gaige de ta foi ?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Voilà deux impudentes carognes !

LUCETTE.

Béni, Françon, béni Jeanet, béni touston, béni toustone, beni fayre beyre à un payre dénaturat la duretat quel a per nautres[2].

NÉRINE.

Venez, Madeleine, men ainfain, venez-ves-en ichi faire honte à vo père de l’impudainche qu’il a.


Scène X.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC, ORONTE, LUCETTE, NÉRINE, PLUSIEURS ENFANTS.
LES ENFANTS.

Ah ! mon papa ! mon papa ! mon papa !

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Diantre soit des petits fils de putains !

LUCETTE.

Coussy, trayte, tu nou sios pas dins la darnière confusiu de ressaupre à tal tous enfants, et de ferma l’aureillo à la tendresso paternello ? Tu nou m’escaperas pas, infame ! yeu te boly seguy pertout, et te reproucha ton crime jusquos à tant que me sio beniado, et que t’ayo fayt penjat ; couquy, te boly fayré penjat[3].

NÉRINE.

Ne rougis-tu mie de dire ches mots-là, et d’être insainsible aux cairesses de chette pauvre ainfaint ? Tu ne te sau-

  1. Quelle impudence ! Comment, misérable, tu ne te souviens plus de la pauvre Françoise et du pauvre Jean, qui sont les fruits de notre mariage ?
  2. Venez, Françoise, venez, Jean, venez tous, venez toutes, venez faire voir à un père dénaturé l’insensibilité qu’il a pour nous tous.
  3. Comment, traître, tu n’es pas dans la dernière confusion de recevoir ainsi tes enfants, et de fermer l’oreille à la tendresse paternelle ! Tu ne m’échapperas pas, infâme ! je veux te suivre partout, et te reprocher ton crime jusqu’à tant que je me sois vengée, et que je t’aie fait pendre, coquin, je veux te faire pendre.