Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/163

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MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Ce n’est pas tant la peur de la mort qui me fait fuir que de ce qu’il est fâcheux à un gentilhomme d’être pendu, et qu’une preuve comme celle-là feroit tort à nos titres de noblesse.

SERIGANI.

Vous avez raison ; on vous contesteroit après cela le titre d’écuyer. Au reste, étudiez-vous, quand je vous mènerai par la main, à bien marcher comme une femme, et à prendre le langage et toutes les manières d’une personne de qualité.

MONSIEUR DE POURCEAUCNAC.

Laissez-moi faire. J’ai vu les personnes du bel air. Tout ce qu’il y a, c’est que j’ai un peu de barbe.

SBRIGANI.

Votre barbe n’est rien ; il y a des femmes qui en ont autant que vous. Çà, voyons un peu comme vous ferez. (Après que monsieur de Pourceaugnac a contrefait la femme de condition.) Bon.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Allons donc, mon carrosse ! Où est-ce qu’est mon carrosse ? Mon Dieu ! qu’on est misérable d’avoir des gens comme cela ! Est-ce qu’on me fera attendre toute la journée sur le pavé, et qu’on ne me fera point venir mon carrosse ?

SBRIGANI.

Fort bien.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Holà ! ho ! cocher, petit laquais ! Ah ! petit fripon, que de coups de fouet je vous ferai donner tantôt ! Petit laquais ! petit laquais ! Où est-ce donc qu’est ce petit laquais ? Ce petit laquais ne se trouvera-t-il point ? Ne me fera-t-on point venir ce petit laquais ? Est-ce que je n’ai point un petit laquais dans le monde ?

SBRIGANI.

Voila qui va à merveille ; mais je remarque une chose : cette coiffe est un peu trop déliée : j’en vais quérir une un peu plus épaisse, pour vous mieux cacher le visage, en cas de quelque rencontre.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Que deviendrai-je cependant ?