Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/214

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n’y a personne qui puisse disputer contre la certitude de ses prédictions.

CLITIDAS.

Assurément.

TIMOCLÈS.

Je suis assez incrédule pour quantité de choses ; mais, pour ce qui est de l’astrologie, il n’y a rien de plus sûr et de plus constant que le succès des horoscopes qu’elle tire.

CLITIDAS.

Ce sont des choses les plus claires du monde.

IPHICRATE.

Cent aventures prédites arrivent tous les jours, qui convainquent les plus opiniâtres.

CLITIDAS.

Il est vrai.

TIMOCLÈS.

Peut-on contester sur cette matière les incidents célèbres dont les histoires nous font foi ?

CLITIDAS.

Il faut n’avoir pas le sens commun. Le moyen de contester ce qui est moulé ?

ARISTIONE.

Sostrate n’en dit mot : quel est son sentiment là-dessus ?

SOSTRATE.

Madame, tous les esprits ne sont pas nés avec les qualités qu’il faut pour la délicatesse de ces belles sciences qu’on nomme curieuses, et il y en a de si matériels, qu’ils ne peuvent aucunement comprendre ce que d’autres conçoivent le plus facilement du monde. Il n’est rien de plus agréable, Madame, que toutes les grandes promesses de ces connaissances sublimes. Transformer tout en or, faire vivre éternellement, guérir par des paroles, se faire aimer de qui l’on veut, savoir tous les secrets de l’avenir, faire descendre, comme on veut, du Ciel sur des métaux des impressions de bonheur, commander aux démons, se faire des armées invisibles et des soldats invulnérables : tout cela est charmant, sans doute ; et il y a des gens qui n’ont aucune peine à en comprendre la possibilité : cela leur est le plus aisé du monde à concevoir. Mais pour moi, je vous avoue que mon esprit grossier a quelque peine à le comprendre et à le croire, et j’ai toujours trouvé cela trop beau pour être véritable.