Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/321

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MONSIEUR JOURDAIN, chantant et dansant.

Hou la ba, ba la chou, ba la ba, ba la da.

(Il tombe par terre.)
MADAME JOURDAIN.

Hélas ! mon Dieu ! mon mari est devenu fou !

MONSIEUR JOURDAIN, se relevant et s’en allant.

Paix, insolente. Portez respect à monsieur le mamamouchi.

MADAME JOURDAIN, seule.

Où est-ce donc qu’il a perdu l’esprit ? Courons l’empêcher de sortir. (Apercevant Dorimène et Dorante.) Ah ! ah ! voici justement le reste de notre écu[1]. Je ne vois que chagrin de tous côtés.


Scène II.

DORANTE, DORIMÈNE.
DORANTE.

Oui, madame, vous verrez la plus plaisante chose qu’on puisse voir ; et je ne crois pas que dans tout le monde il soit possible de trouver encore un homme aussi fou que celui-là. Et puis, madame, il faut tâcher de servir l’amour de Cléonte, et d’appuyer toute sa mascarade. C’est un fort galant homme, et qui mérite que l’on s’intéresse pour lui.

DORIMÈNE.

J’en fais beaucoup de cas, et il est digne d’une bonne fortune.

DORANTE.

Outre cela, nous avons ici, madame, un ballet qui nous revient, que nous ne devons pas laisser perdre ; et il faut bien voir si mon idée pourra réussir.

DORIMÈNE.

J’ai vu là des apprêts magnifiques, et ce sont des choses, Dorante, que je ne puis plus souffrir. Oui, je veux enfin vous empêcher vos profusions ; et, pour rompre le cours à toutes les dépenses que je vous vois faire pour moi, j’ai résolu de me marier promptement avec vous. C’en est le vrai secret, et toutes ces choses unissent avec le mariage, comme vous savez[2].

  1. Expression figurée, prise du change des monnaies. Voici le resie de notre du ! c’est-à-dire : voici qui complète notre infortune. (F. Genin.)
  2. Ces mots, comme vous savez, sont ajoutés dans l’édition de 1682.