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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/65

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le monde ; et jamais on ne parle de vous que sous les noms d’avare, de ladre, de vilain et de fesse-matthieu[1].

Harpagon, en battant maître Jacques.

Vous êtes un sot, un maraud, un coquin, et un impudent.

Maître Jacques

Eh bien ! ne l’avais-je pas deviné ? Vous ne m’avez pas voulu croire. Je vous l’avais bien dit que je vous fâcherois de vous dire la vérité.

Harpagon

Apprenez à parler.


Scène VI.

VALÈRE, MAÎTRE JACQUES.
Valère, riant.

À ce que je puis voir, maître Jacques, on paie mal votre franchise.

Maître Jacques

Morbleu ! Monsieur le nouveau venu, qui faites l’homme d’importance, ce n’est pas votre affaire. Riez de vos coups de bâton quand on vous on donnera, et ne venez point rire des miens.

Valère

Ah ! Monsieur maître Jacques, ne vous fâchez pas, je vous prie.

Maître Jacques, à part.

Il file doux. Je veux faire le brave, et, s’il est assez sot pour me craindre, le frotter quelque peu. (Haut.) Savez-vous bien, Monsieur le rieur, que je ne ris pas, moi, et que, si vous m’échauffez la tête, je vous ferai rire d’une autre sorte ?

Maître Jacques pousse Valère jusqu’au bout du théâtre en le menaçant.

Valère

Hé ! doucement.

Maître Jacques

Comment, doucement ? Il ne me plaît pas, moi.

  1. Molière a pris l’idée de cette scène dans la comédie a Suppositi, de l’Arioste, dont nous avons parlé plus haut. Voici le passage : «Le perfide dit de vous tous les maux que l’on sauroit penser. — Ah ! le méchant ! Et que dit-il ? — Tout le pis qu’on sauroit dire. — Ô Dieu ! — Que vous êtes le plus avare et misérable homme qui oncques naquit, et que vous le laissez mourir de male mort de faim. » (Acte II, scène iv, traduction de de Mesmes.)
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