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pour mon maître : il a quelque droit de me battre ; mais, pour ce monsieur l’intendant, je m’en vengerai si je le puis.


Scène VII

MARIANE, FROSINE, MAÎTRE JACQUES.
Frosine

Savez-vous, maître Jacques, si votre maître est au logis ?

Maître Jacques

Oui, vraiment il y est ; je ne le sais que trop.

Frosine

Dites-lui, je vous prie, que nous sommes ici.

Maître Jacques

Ah ! nous voilà pas mal !


Scène VII.

MARIANE, FROSINE.

Mariane Ah ! que je suis, Frosine, dans un étrange état, et, s’il faut dire ce que je sens, que j’appréhende cette vue !

Frosine

Mais pourquoi, et quelle est votre inquiétude ?

Mariane

Hélas ! me le demandez-vous ? Et ne vous figurez-vous point les alarmes d’une personne toute prête à voir le supplice où l’on veut l’attacher ?

Frosine

Je vois bien que, pour mourir agréablement, Harpagon n’est pas le supplice que vous voudriez embrasser ; et je connais, à votre mine, que le jeune blondin dont vous m’avez parlé vous revient un peu dans l’esprit.

Mariane

Oui. C’est une chose, Frosine, dont je ne veux pas me défendre ; et les visites respectueuses qu’il a rendues chez nous ont fait, je vous l’avoue, quelque effet dans mon âme.

Frosine

Mais avez-vous su quel il est ?

Mariane

Non, je ne sais point quel il est. Mais je sais qu’il est fait d’un air à se faire aimer ; que, si l’on pouvait mettre les choses à mon choix, je le prendrois plutôt qu’un autre ; et qu’il ne contribue pas peu à me faire trouver un tourment effroyable dans l’époux qu’on veut me donner.