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Page:Molière - Œuvres complètes, CL, 1888, tome 04.djvu/14

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Mercure.

Ma foi, me trouvant las, pour ne pouvoir fournir
Aux différents emplois où Jupiter m’engage,
Je me suis doucement assis sur ce nuage,
Pour vous attendre venir.

La Nuit.

Vous vous moquez, Mercure, et vous n’y songez pas ;
Sied-il bien à des dieux de dire qu’ils sont las ?

Mercure.

Les dieux sont-ils de fer ?

La Nuit.

Les Dieux sont-ils de fer ? Non ; mais il faut sans cesse
Garder le décorum de la divinité.
Il est de certains mots dont l’usage rabaisse
Cette sublime qualité,
Et que, pour leur indignité,
Il est bon qu’aux hommes on laisse.

Mercure.

À votre aise vous en parlez ;
Et vous avez, la belle, une chaise roulante
Où, par deux bons chevaux, en dame nonchalante,
Vous vous faites traîner partout où vous voulez.
Mais de moi ce n’est pas de même :
Et je ne puis vouloir, dans mon destin fatal,
Aux poètes assez de mal
De leur impertinence extrême,
D’avoir, par une injuste loi
Dont on veut maintenir l’usage,
À chaque dieu, dans son emploi,
Donné quelque allure en partage,
Et de me laisser à pied, moi,
Comme un messager de village ;
Moi qui suis, comme on sait, en terre et dans les cieux
Le fameux messager du souverain des dieux ;