Comment, mon père, comme vous voilà fait ! est-ce une comédie que vous jouez ?
Monsieur Jourdain
Non, non, ce n’est pas une comédie, c’est une affaire fort sérieuse, et la plus pleine d’honneur pour vous qui se peut souhaiter. Voilà le mari que je vous donne.
Lucile
À moi, mon père ?
Monsieur Jourdain
Oui, à vous : allons, touchez-lui dans la main, et rendez grâce au Ciel de votre bonheur.
Lucile
Je ne veux point me marier.
Monsieur Jourdain
Je le veux, moi qui suis votre père.
Lucile
Je n’en ferai rien.
Monsieur Jourdain
Ah ! que de bruit ! Allons, vous dis-je. Çà votre main.
Lucile
Non, mon père, je vous l’ai dit, il n’est point de pouvoir qui me puisse obliger à prendre un autre mari que Cléonte ; et je me résoudrai plutôt à toutes les extrémités, que de… (Reconnaissant Cléonte.) il est vrai que vous êtes mon père, je vous dois entière obéissance, et c’est à vous à disposer de moi selon vos volontés.
Monsieur Jourdain
Ah ! je suis ravi de vous voir si promptement revenue dans votre devoir, et voilà qui me plaît, d’avoir une fille obéissante.
Scène VI
Madame Jourdain
Comment donc ? qu’est-ce que c’est que ceci ? On dit que vous voulez donner votre fille en mariage à un carême-prenant ?
Monsieur Jourdain
Voulez-vous vous taire, impertinente ? Vous venez toujours