Page:Molière - Œuvres complètes, Hachette, 1873, tome 01.djvu/467

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ACTE II, SCENE I. 43i

FROSIXE,

Encore ?

ASCAGNE.

Je la suis, dis-je, sans qu’il le pense,
Ni qu’il ait de mon sort la moindre connoissance. 420

FROSINE.

Ho ! poussez : je le quitte *, et ne raisonne plus,
Tant mes sens coup sur coup se treuvent^ confondus.
A ces énigmes-là je ne puis rien comprendre.

ASCAGXE.

Je vais vous l’expliquer, si vous voulez m’entendre.
Valère, dans les fers de ma sœur arrêté, 425
Me sembloit un amant digne d’être écouté ;
Et je ne pouvois voir qu’on rebutât sa flamme ^
Sans qu’un peu d’intérêt touchât pour lui mon âme :
Je voulois que Lucile aimât son entretien,
Je blâmois ses rigueurs, et les blâmai si bien, 430
Que moi-même j’entrai, sans pouvoir m’en défendre,
Dans tous les sentiments qu’elle ne pouvoit prendre.
C’étoit, en lui parlant, moi qu’il persuadoit ;
Je me laissois gagner aux soupirs qu’il perdoit ;
Et ses vœux, rejetés de l’objet qui l’enflamme, 435
Etoient, comme vainqueurs, reçus dedans mon âme.
Ainsi mon cœur, Frosine, un peu trop foible, hélas !
Se rendit à des soins qu’on ne lui rendoit pas.
Par un coup réfléchi reçut une blessure.
Et paya pour un autre avec beaucoup d’usure. 440
Enfin, ma chère, enfin l’amour que j’eus pour lui
Se voulut expliquer, mais sous le nom d’autrui :
Dans ma bouche^, une nuit, cet amant trop aimable


. Je le quitte, j’y renonce. . Toutes les éditions, sauf la première et celles de 1675 et de 1693 A, écrivent se trouvent. . Je ne pouvoîs souffrir qu’on rebutât sa flamme. (1682, I734-) . « Dans ma bouche, » en m’écoutant, moi qui faisais parler Lucile, qui