Mais un dragon veillant sur ce rare trésor,
N’a pu, quoi qu’il ait fait, le lui permettre encor,
Et, ce qui plus le gêne et le rend misérable,
Il vient de découvrir un rival redoutable ;
Si bien que, pour savoir si ses soins amoureux
Ont sujet d’espérer quelque succès heureux,
Je viens vous consulter, sûr que de votre bouche
Je puis apprendre au vrai le secret qui nous touche.
Sous quel astre ton maître a-t-il reçu le jour ?
Sous un astre à jamais ne changer son amour.
Sans me nommer l’objet pour qui son cœur soupire,
La science que j’ai m’en peut assez instruire :
Cette fille a du cœur, et dans l’adversité
Elle sait conserver une noble fierté ;
Elle n’est pas d’humeur à trop faire connaître
Les secrets sentiments qu’en son cœur on fait naître ;
Mais je les sais comme elle, et, d’un esprit plus doux,
Je vais en peu de mots vous les découvrir tous.
Ô merveilleux pouvoir de la vertu magique !
Si ton maître en ce point de constance se pique,
Et que la vertu seule anime son dessein,
Qu’il n’appréhende plus de soupirer en vain :
Il a lieu d’espérer, et le fort qu’il veut prendre
N’est pas sourd aux traités, et voudra bien se rendre.