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LIVRE I, CHAP. IX

saurait justifier l’échafaudage de toute une Babel d’opinions erronées. C’est ainsi qu’on a expliqué le commerce maritime des Étrusques par les habitudes de la piraterie lydienne puis, que plus tard, acceptant sans contrôle une opinion relatée par Thucydide lui-même[1], on a fait des pirates Torrhébes un rameau détaché de la grande souche des Pélasges, ces flibustiers des anciennes mers. À partir de là, la tradition embrouille considérablement l’histoire. Les Tyrrhéniens sont les Torrhébes de Lydie, à en croire les documents les plus antiques, les hymnes homériques[2] ; ailleurs, ils ne sont que des Pélasges, ou même ils constituent à eux tout seuls la nation pélasgique : ailleurs enfin, ils sont les Étrusques italiques, sans avoir jamais eu avec les Pélasges ou les Torrhébes des relations continues, et sans avoir avec eux une commune origine.

Il est d’un plus haut intérêt de déterminer la contrée où les Étrusques se sont établis d’abord, et d’où ils ont rayonné en divers sens. Avant la grande invasion celtique, ils s’étaient arrêtés au nord du Pô, tout le démontre ; Régions italiennes occupées par les Étrusques. touchant du côté de l’est à l’Athésis [Adige], et aux Vénètes, de race illyrienne (ou albanaise ?), et du côté de l’ouest aux Ligures. Citons-en pour preuve, encore, ce rude dialecte étrusque, parlé jusque dans le siècle de Tite-Live par les habitants des Alpes rhétiques ; citons Mantoue, restée étrusque jusque dans les temps postérieurs. Au sud, et aux embouchures du Pô, les Étrusques et les Ombriens s’étaient mêlés, les premiers dominant sur les seconds. Ceux-ci avaient pour eux l’ancienneté ; ils avaient fondé les villes de commerce d’Hatria et de Spina ; Felsina (Bononia, Bologne) et Ravenne au contraire semblent étrusques. Les Celtes eurent

  1. [Thucyd. IV, 109.]
  2. [Hymn. in Bacch. v. 7 et 59.]